• Un arum attire les mouches avec une odeur qui ressemble à celle du vinaigre.

    Ca sent le vinaigre !

    Un arum attire les mouches avec une odeur qui ressemble à celle du vinaigre.

    Loïc Mangin

    Les arums sont des fleurs étonnantes. Certaines espèces, tel le gouet d'Italie (Arum italicum), produisent de la chaleur. D'autres, comme l'arum mange-mouches (Helicodiceros muscivorus), émettent une odeur nauséabonde de cadavre... Johannes Stökl, de l'Institut Max Planck pour l'écologie chimique, à Iéna, en Allemagne, et ses collègues, ont étudié une autre espèce, Arum palaestinum, et montré qu'elle libère des fragrances rappelant le vinaigre !

    Ils ont révélé que cette fleur attire spécifiquement des mouches drosophiles, c'est-à-dire les mouches du vinaigre, un genre regroupant près de 400 espèces. Pour ce faire, la plante émet des composés volatils qui miment des produits de la fermentation alcoolique telle qu'elle est pratiquée par les levures. Le mélange de six molécules, qui ont été identifiées, suffit à tromper les insectes. Parmi elles, l'acétate de butan-2,3-diol et l'acétate de 3-hydroxybutanone sont rares dans le monde végétal, mais sont caractéristiques du vin et du vinaigre, notamment balsamique.

     

    L'inflorescence de l'Arum palaestinum porte des fleurs mâles et des fleurs femelles. Pendant le premier jour, les fleurs mâles ne produisent pas de pollen tandis que les fleurs femelles, dans la partie inférieure sont disponibles pour recevoir du pollen. Les mouches, attirées par l'odeur de vinaigre, restent piégées pendant une nuit, puis, le matin suivant, les fleurs mâles libèrent du pollen alors que les fleurs femelles ont cessé d'être réceptives. Les filaments, désormais abaissés, n'interdisent plus la sortie : les mouches couvertes de pollen s'échappent.

    Cette association a été confirmée par des expériences d'imagerie fonctionnelle : la perception du bouquet de l'arum et celle de divers composés obtenus par fermentation (fruits pourris, Lambrusco, vinaigre balsamique...) se traduisent par l'activation des mêmes régions du système nerveux de l'insecte. En outre, sept des huit espèces de mouches visitant l'arum ont révélé des enregistrements semblables, bien que leur ancêtre commun date de 40 millions d'années, montrant que la fleur « cible » un circuit neuronal basal du système olfactif, partagé par des espèces aux préférences écologiques communes.

    Arum palaestinum infirme ainsi l'adage selon lequel on n'attire pas des mouches avec du vinaigre...

    http://www.pourlascience.fr/ewb_pages/a/actualite-ca-sent-le-vinaigre-26013.php

    © Avner Cohen
    © Avner Cohen

    Un arum (Arum palaestinum).

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    © Johannes Stökl
    © Johannes Stökl

    Des mouches du vinaigre sont piégées près de l’inflorescence de l’arum.

    © Antonia Strutz
    © Antonia Strutz

    L’image révèle la stimulation (en rouge) des glomérules olfactifs de la mouche du vinaigre Drosophila melanogaster, par l’odeur de l’arum.

    POUR EN SAVOIR PLUS

    J. Stökl et al., A deceptive pollination system targeting drosophilids through olfactory mimicry of yeast, Current Biology, à paraître, 2010.

    Dans Pour la Science : Des fleurs à " sang chaud ", n° 359, septembre 2007.

    L'AUTEUR

    Loïc Mangin est rédacteur en chef adjoint à Pour la Science.

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    © Arnold
    Une inflorecence d'Arum palaestinum.

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