• Des reptiles marins à sang chaud au Mésozoïque

    Comme les grands poissons prédateurs et les mammifères marins d'aujourd'hui, les reptiles marins qui occupaient leurs niches écologiques il y a entre 205 et 65 millions d'années produisaient leur propre chaleur corporelle.

    François Savatier

    Bien avant nos mammifères marins, d'autres formes sont passées de la terre à la mer. C'est le cas des ichtyosaures, des plésiosaures et des mosasaures, des reptiles marins qui chassaient dans les mers du Mésozoïque (durant le Jurassique et le Crétacé, c'est-à-dire entre 205 et 65 millions d'années). Les géochimistes Aurélien Bernard et Christophe Lécuyer, de l'Université de Lyon, et une équipe de paléontologues français viennent de montrer que ces animaux avaient une température corporelle élevée, mais peut-être variable. 

    Plus exactement, les chercheurs ont montré qu'ils étaient endothermes. Alors que l'homéothermie est le maintien d'une température corporelle constante, l'endothermie est la capacité à produire en permanence une chaleur corporelle interne. Ces deux types de métabolismes thermiques conviennent aux besoins de prédateurs. Les ichtyosaures, tels les dauphins auxquels ils ressemblent, et les nageurs à long cou qu'étaient les plésiosaures étaient des « poursuiveurs », tandis que les mosasaures avec leur corps de varan à longue queue flanqué de membres puissants en forme de pagaies, étaient des chasseurs à l'embuscade. Tous ces animaux étaient manifestement bien adaptés à une vie de chasse, caractérisée par des vitesses de croisière élevées et un métabolisme rapide, comparable à celui d'un… thon ! 

    Chez les animaux aquatiques, le rapport isotopique de l'oxygène 16 et de l'oxygène 18 dans le squelette varie selon leur température corporelle et celle des eaux où il vivent. Après avoir reconstitué la température des eaux du Mésozoïque, les chercheurs ont mesuré le taux d'oxygène 18 dans les dents de fossiles des trois familles de reptiles et dans celles de poissons qui vivaient dans les mêmes eaux. Il ressort de ces mesures que les températures corporelles de ces différents reptiles variaient de 35 à 39°C, et ce qu'ils aient vécu dans des eaux chaudes (jusqu'a 35°C) ou froides (jusqu'à 12°C). Quelque mécanisme physiologique produisait donc la chaleur nécessaire à la réactivité des muscles qui caractérise tous les chasseurs. 

    Des reptiles marins à sang chaud au Mésozoïque
    Université de Lyon

    Une dent de mosasaure (à droite) et une autre d'ichthyosaure (à gauche). C'est dans ce type de dents fossiles que les chercheurs ont mesuré le taux d'oxygène 18 absorbé par ces animaux pendant leur croissance ; ils en ont déduit leur température corporelle.

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    Un mosasaure (Prognathodon) attrape une ammonite dans les eaux de l'océan crétacé, où rode aussi un plésiosaure (Elasmosaurus) au long cou caractéristique.

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    Alain Bénéteau
    Un ichthyosaure (Platypterygius) saute au-dessus de l'océan crétacé après avoir attrapé un calmar.

    L'AUTEUR

    François Savatier est l'un des rédacteurs de la revue Pour la Science.

    POUR EN SAVOIR PLUS

    A. Bernard et Coll., Regulation of Body temperature by Some mesozoic Marine ReptilesScience, vol. 328, pp. 1379-1382, 2010.

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