• La recherche sur l'embryon en débat au Sénat

    L'hémicycle du Sénat / © Sénat / Flickr
    Le Sénat va-t-il autoriser la recherche sur l’embryon et les cellules souches embryonnaires ? L’examen du projet de loi relatif à la bioéthique débute ce mardi 5 avril. Il devrait durer trois jours.

    Surprenants sénateurs ! Mercredi 30 mars, les membres de la commission des Affaires sociales ont frappé un grand coup : ils ont considérablement modifié le texte de loi relatif à la bioéthique issu de l’Assemblée. Le coup de canif a notamment porté sur l’article 23 concernant la recherche sur l’embryon et les cellules souches embryonnaires.

    Fini le régime d’interdiction de la recherche sur l’embryon, assorti de dérogations, en vigueur depuis la loi du 6 août 2004 : sous l’impulsion d’Alain Milon, le rapporteur (UMP) de la Commission, celui-ci a été remplacé par un régime d’autorisation encadré. Ainsi modifié, le projet de loi suit les recommandations du Conseil d’État, de l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques (OPECST) ou encore de l’Académie de médecine.

    Fin de l’incohérence

    Ce texte met fin à l’incohérence de la loi de 2004 qui consistait à autoriser quelque chose d’interdit. Incohérence que le président de l’Institut Curie, Claude Huriet, à l’origine des premières lois de bioéthique de 1994, n’avait pas manqué de relever : « on ne peut pas à la fois interdire en s’appuyant, j’imagine, sur des valeurs profondes et intangibles, et autoriser à titre dérogatoire pendant une période de cinq ans », avait-il déclaré lors d’une audition publique organisée fin 2007 par l’OPECST.

    Pourquoi ce revirement ? Dans le rapport accompagnant le texte de loi, Alain Milon insiste sur le fait qu’« on ne peut juxtaposer durablement un principe et les conditions qui permettent de s’en abstraire sous peine, tout à la fois, de dévaloriser la loi et de nuire au travail des chercheurs soumis à l’incertitude inhérente à une norme contradictoire ».

    Discussion animée

    La discussion promet d’être animée. En dépit de la logique du propos, certains sénateurs ont, sans surprise, déposé des amendements visant à restaurer l’interdiction. D’autres, à l’inverse, ont souhaité expliciter plus clairement encore l’autorisation.

    La recherche sur l'embryon en chiffres :
    Les embryons humains utilisés à des fins de recherche ne doivent plus faire l’objet d’un projet parental. Leurs « parents » doivent en avoir explicitement fait don à la recherche.
    149 191 embryons humains sont congelés en France
    98 412 embryons font l’objet d’un projet parental
    10 776 embryons ont été donnés à la recherche (fin 2008).
    931 embryons ont été utilisés à des fins scientifiques entre 2005 et 2008.
    Source : le dernier rapport annuel de l’Agence de la Biomédecine (PDF).

    La nature des travaux autorisés devrait constituer un des points de crispation. La loi de 2004 conditionnait les dérogations au fait que les recherches menées sur l’embryon soient « susceptibles de permettre des progrès thérapeutiques majeurs ». L’actuelle proposition de loi reprend cette condition.

    Hélas, l’intention est contraire à la réalité de la recherche médicale, ses résultats étant par essence imprédictibles. En outre, cette condition exclut toute recherche fondamentale. Or celle-ci génère in fine de nombreuses avancées thérapeutiques, comme l’illustre le dossier que publie ce mois-ci La Recherche sur « Les promesses de la médecine régénératrice ».

    Auditionnée le 9 mars dernier par la commission des Affaires sociales, Emmanuelle Prada-Bordenave, directrice de l’agence de la biomédecine, a expliqué que cette condition était actuellement interprétée comme recouvrant « toutes les recherches contribuant au soin, y compris, pour les maladies dont on ignore la cause ou le processus, celles qui permettent d’éclairer ceux-ci ». Autrement dit, de la recherche fondamentale à finalité biomédicale. Dès lors, pourquoi ne pas l’écrire noir sur blanc, dans le projet de loi ?

     

    Cécile Klingler

    http://www.larecherche.fr/content/actualite-politique/article?id=29499

    Sur le même thème La Recherche a publié :

    Des cellules adultes rajeunies in vitro
    (n°441 mai 2010)

    Cellules souches, résultats embryonnaires (n°382, mai 2005)

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