• Pour la première fois, un vaccin contre le sida a montré une efficacité chez l’homme. Bien que modeste, elle est très encourageante pour la communauté scientifique. (© Sol-Foulon,N., Prevost M.C., Schwartz O.)

    Un vaccin contre le sida a montré pour la première fois des effets protecteurs sur l’homme. Mais des effets modestes : il prévient l’infection dans 31 % des cas. L’annonce a été faite en Thaïlande, berceau de cet essai clinique de phase 3, financé en grande partie par les Instituts de la santé américains (NIH). Plus de 16 000 Thaïlandais y ont participé. Sur les 8198 personnes ayant reçu le placebo, 74 ont été infectées par le virus du sida. Elles n’étaient que 51 sur les 8197 personnes vaccinées.

    Avec un tiers de personnes protégées seulement, "ce vaccin ne nous permettra pas de contrôler l’épidémie de sida, explique Yves Lévy, directeur scientifique du programme vaccins de l’ANRS. Mais il constitue un signal extrêmement fort pour la communauté scientifique : il montre que l’on peut vacciner contre le VIH". Une information qui n’allait pas de soi, aucun vaccin contre le sida n’a montré jusqu’à présent d’efficacité sur l’homme.

    L’essai thaïlandais, lancé en 2003, faisait d’ailleurs l’objet d’une intense controverse scientifique. La substance testée est composée de deux vaccins antisida au mode d’action très différent. Or, testés séparément sur l’homme, aucun des deux n’avaient conféré de protection contre le VIH ! Dès lors, la combinaison de ces deux stratégies pouvait-elle être efficace ? "Ce concept, soutenu par l’ANRS depuis longtemps, est validé par ces résultats", note Yves Lévy.

    Le premier vaccin utilisé est une molécule située à la surface du virus du sida, la gp 120. Injectée dans l’organisme, elle provoque la fabrication d’anticorps contre le VIH. Le deuxième vaccin est un virus de canari. Inoffensif pour l’homme, il contient des gènes du virus du sida. Une fois dans l’organisme, il fait fabriquer aux cellules des protéines du VIH. Le système immunitaire apprend alors à les reconnaître et à les combattre.

    " En combinant ces deux vaccins, explique Y.Lévy, on cherche à créer des réponses immunitaires complémentaires et efficaces. Visiblement, cela fonctionne dans une certaine mesure. Reste à savoir comment naît cette protection contre le virus du sida et pourquoi elle n’apparaît pas chez tout le monde. Ces résultats vont orienter les futures recherches sur le vaccin". Le détail des résultats scientifiques sera présenté à Paris, lors de la conférence internationale Aids Vaccine qui se tiendra du 19 au 21 octobre 2009.

    Sophie Coisne

    Sur le même sujet

    - Michel Kazatchkine : « Contre le sida, ne relâchons pas nos efforts ! » (La Recherche, avril 2008)

    - Françoise Barré-Sinoussi : « Revenons aux fondamentaux pour lutter contre le sida » (La Recherche, décembre 2008)

    - Communiqué de presse du NIAID (National institute of allergy and infectious deseases)

    http://www.larecherche.fr/content/actualite/article?id=26462


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  • Aujourd’hui, des expériences donnent raison à certains théoriciens précurseurs : le fonctionnement des cellules repose pour beaucoup sur... le hasard ! (© Michael Elowitz/Caltech)

    Faudra-t-il jeter au panier la plupart des ouvrages de biologie cellulaire ? Peut-être pas, mais une sérieuse révision s’impose. Car c’est bel et bien un dogme qui se trouve ébranlé. Qu’on en juge : les gènes de cellules identiques, placées dans le même environnement, ne se comportent pas de la même façon. Mieux encore, une expérience décisive a prouvé qu’au sein d’une même cellule, deux gènes identiques s’expriment différemment. Autrement dit, l’expression des gènes en protéines n’est pas le phénomène déterministe décrit à longueur d’ouvrage ! In fine, il s’avère même que l’aspect aléatoire de ces processus moléculaires joue un rôle essentiel dans le destin des cellules, qu’il s’agisse de bactéries, de levures, ou de nos propres cellules.

    Pourtant, un oeuf de poule donne toujours un poussin... Comment est-ce possible, si le hasard intervient ? Pour le comprendre, plongez dans notre dossier d’octobre. Nous y découvrons comment une poignée de chercheurs, souvent théoriciens, ont commencé à remettre en question le déterminisme de la biologie actuelle. Comment des expérimentateurs, souvent physiciens de formation, se sont lancés dans l’examen de cellules individuelles, aidés en cela par les progrès fulgurants des instruments d’imagerie. Et enfin comment, mettant en commun leurs compétences et leurs résultats, ils proposent aujourd’hui une vision renouvelée de la biologie. Une vision où hasard et déterminisme sont indissociablement liés, et alliés.

    Cécile Klingler


    Sur le web

    - http://tinyurl.com/conferences-biologie-theorique : Accédez aux enregistrements du cycle de conférences "Biologie théorique" organisé par l’École normale supérieure en février 2006

    - www.elowitz.caltech.edu/research.html : Un descriptif des expériences menées dans le laboratoire de Michale Elowitz, avec des films montrant la dynamique cellulaire.

    http://www.larecherche.fr/content/actualite/article?id=26465


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  • La planète CoRoT-7b, de cinq masses terrestres, est bien constituée de roches, mais elles sont probablement en fusion.
    Loïc Mangin

    En février 2009, le satellite CoRoT débusque une petite exoplanète autour d'une étoile nommée CoRoT-7, à 500 millions d'années-lumière de la Terre, dans la constellation de la Licorne. La planète, CoRoT-7b, attire l'attention des astronomes, car son transit (en passant devant l'étoile, elle atténue la luminosité de celle-ci) a révélé que son rayon est à peine deux fois plus grand que celui de la Terre ! Est-elle tellurique, c'est-à-dire rocheuse ? Pour le savoir, on doit connaître sa densité, et donc sa masse. C'est ce qu'a mesuré une équipe internationale incluant notamment l'Institut d'astrophysique de Paris et les Observatoires de Provence, de Paris et de la Côte d'Azur.

    CoRoT-7 est une étoile de type solaire, âgée de 1,5 milliard d'années. CoRoT-7b est en orbite à seulement 2,5 millions de kilomètres de distance, soit 23 fois moins que la distance Mercure-Soleil. Pour déterminer la masse de la planète, les instruments doivent détecter de faibles variations périodiques du spectre de l'étoile (ces variations, résultant d'un effet Doppler, trahissent un mouvement circulaire de l'astre dû à l'interaction gravitationnelle avec une planète). Or c'est délicat avec le satellite CoRoT, car des taches stellaires, l'équivalent de taches solaires, brouillent un signal déjà faible. Le problème a été résolu avec l'instrument HARPS, un spectrographe à haute résolution installé sur le téléscope de l'ESO de 3,6 mètres de diamètre à l'Observatoire La Silla, au Chili.

    HARPS a révélé que CoRoT-7b, avec cinq masses terrestres, est l'une des plus légères exoplanètes connues. Sa densité de 4,7, soit 85 pour cent de celle de la Terre (5,5), en fait une planète tellurique. Cependant, puisqu'elle est proche de son étoile, la température à sa surface est de l'ordre de 2 000 degrés : selon les modèles, elle serait couverte de roches en fusion ou de vapeur d'eau émanant d'océans en ébullition.

    HARPS a également détecté une autre planète (CoRoT-7c), plus éloignée que CoRoT-7b. Son orbite est de 3 jours et 17 heures (contre environ 20 heures pour CoRoT-7b). Avec huit masses terrestres, c'est une super-Terre, mais l'absence de transit empêche de déterminer sa masse.

    http://www.pourlascience.fr/ewb_pages/a/actualite-la-premiere-super-terre-rocheuse-23456.php


    La première super-Terre rocheuse
    ESO/L. Calcada
    L'étoile CoRoT-7 vue depuis la planète CoRoT-7b, une super-Terre de cinq masses terrestres en orbite à 2,5 millions de kilomètres de l'astre (vue d'artiste).

    à voir aussi

    ESO
    L'étoile CoRoT-7 abrite un système d'au moins deux super-Terres, dont l'une est tellurique (CoRoT-7b)
    ESO
    L'environnement de l'étoile CoRoT-7.

    L'auteur

    Loïc Mangin est rédacteur en chef adjoint à Pour la Science.

    Pour en savoir plus

    D. Queloz et al., The CoRoT-7 planetary system : two orbiting Super-Earths, Astronomy & Astrophysics, à paraître le 22 octobre 2009.
     
    Et notamment l’article Super-Terres en vue ! par François Bouchy.

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  • Sébastien Bohler

    On vient de découvrir que la préséniline, une molécule qui a pour fonction de découper en un endroit précis la protéine nommée précurseur de l'amyloïde, en cause dans la maladie d'Alzheimer, interviendrait également dans le fonctionnement des synapses, les connexions entre neurones : une mutation, présente dans certaines formes héréditaires de la maladie d'Alzheimer, aboutirait à un mauvais fonctionnement des synapses, expliquant les pertes de mémoire et des fonctions cognitives des malades.

    Les expériences, réalisées à l'Université de Boston, ont consisté à inactiver, chez la souris, le gène de la préséniline dans les neurones d'une zone essentielle à la mémorisation, l'hippocampe. Le gène a été inactivé soit en amont de la jonction entre neurones (côté présynaptique), soit en aval (côté postsynaptique). L'inactivation présynaptique a entraîné la perte d'une propriété essentielle à la mémorisation : la « potentialisation à long terme », c'est-à-dire la capacité de deux neurones à renforcer leur communication à mesure qu'ils sont activés simultanément. En d'autres termes, sans préséniline présynaptique, la mémorisation n'est plus possible.

    Ces travaux détaillent en outre le fonctionnement de la préséniline au sein des synapses : normalement, cette molécule assure la libération d'un important neuromédiateur d'un neurone à l'autre, le glutamate. Il s'ensuit une libération des réserves de calcium intracellulaire dans le neurone cible, ce qui participe à la stabilisation de la synapse et à la « mémorisation » de l'information. La préséniline absente, ce mécanisme est entravé.

    Cette découverte montre qu'un défaut de transmission de l'information dans les zones cérébrales de la mémorisation est peut-être la cause de la maladie d'Alzheimer chez certains patients. Une alternative aux pistes les plus fréquemment explorées, mettant en cause des fibrilles entravant le fonctionnement des neurones, et les plaques amyloïdes qui les compriment.

    http://www.pourlascience.fr/ewb_pages/a/actualite-alzheimer-informations-mal-transmises-23462.php


    Alzheimer : informations mal transmises
    Alexander Raths / Shutterstock

     

    Pour en savoir plus

    C. Zhang et al., Presenilins are essential for regulating neurotransmitter release , in Nature, vol. 460, p. 632, 2009

    L'auteur

    Sébastien Bohler est journaliste à Cerveau&Psycho.

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  • L'interaction avec des récepteurs pulmonaires et des facteurs immunitaires semblent expliquer la virulence du virus grippal A(H1N1) chez certaines personnes.

    Jean-Jacques Perrier
    Le nouveau virus de la grippe A(H1N1) est-il plus dangereux que le virus saisonnier ? La mort, mi-septembre, de deux Français apparemment en bonne santé, âgés de 26 et 29 ans, repose une question qui plane depuis le début de la pandémie. Tous deux sont décédés d'une pneumonie suivie d'un syndrome de détresse respiratoire aiguë (SDRA), l'un de façon fulgurante, l'autre au bout de plusieurs semaines d'hospitalisation en Grèce.

    Or l'équipe de Ten Feizi, de l'Imperial College de Londres, vient de mettre en évidence un mécanisme qui expliquerait que le virus provoque de plus graves symptômes que le virus saisonnier, chez certaines personnes. Tous les virus de la grippe infectent les cellules de l'appareil respiratoire en se fixant à des récepteurs. Ces récepteurs sont des molécules d'acide sialique liées à un galactose par des liaisons nommées alpha-2,6 et alpha-2,3. Or, expliquent T. Feizi et ses collègues, alors que le virus saisonnier s'attache aux récepteurs alpha-2,6 présents sur les cellules de l'appareil respiratoire supérieur, le virus A(H1N1) a la particularité de se lier aussi aux récepteurs alpha-2,3 qui tapissent l'appareil respiratoire inférieur, provoquant des lésions et une infection plus grave.

    Cette conclusion corrobore des résultats obtenus en juillet chez la souris, le furet et le macaque par l'équipe de Ron Fouchier, du Centre Erasmus de Rotterdam, et plusieurs équipes japonaises coordonnées par Yoshihiro Kawaoka, à l'Université de Kobé : ils montraient que le nouveau virus s'installe dans les alvéoles pulmonaires et qu'il provoque des lésions bronchiques et pulmonaires plus nettes que le virus saisonnier (voir la photo).

    Selon Antoine Flahault, professeur d'épidémiologie à l'École des hautes études en santé publique, les données de l'île Maurice et de la Nouvelle-Calédonie indiquent que la mortalité « directe » du virus de 2009, par SDRA, est bien supérieure à celle du virus saisonnier : de l'ordre de 1 pour 10 000, contre 1 pour un million. Les données mexicaines publiées le 13 août ne donnent pas de statistiques globales, mais confirment qu'au moins sept sujets jeunes et en bonne santé sont décédés de cette grippe entre le 24 mars et le 24 avril 2009, sur 18 cas de pneumonie dus au virus. D'après une publication espagnole du 15 septembre, sur 32 adultes admis en réanimation pour pneumopathie virale entre le 23 juin et le 31 juillet 2009, seuls 16 souffraient d'une pathologie préexistante.

    Ces faits suggèrent que des facteurs individuels sont en jeu : les caractéristiques individuelles des récepteurs viraux pourraient en faire partie ; mais aussi des variations de la qualité des réponses immunitaires. Une étude de l'équipe de Béatrice Riteau, à l'INRA de Jouy-en-Josas, montre ainsi que diverses souches de virus de la grippe A déclenchent, dans les cellules des alvéoles pulmonaires, la production de molécules HLA-G, connues pour inhiber les réactions immunitaires. En fabriquant ces molécules, les cellules infectées par H1N1 ne seraient pas reconnues par le système immunitaire et ne seraient pas détruites, permettant au virus de proliférer dans l'organisme. Les molécules HLA-G étant essentiellement synthétisées lors de la grossesse, cette découverte pourrait également expliquer la plus grande vulnérabilité des femmes enceintes vis-à-vis du virus A(H1N1). En effet, en produisant de très grandes quantités de molécules HLA-G, leur système immunitaire serait inhibé avant même que l'infection grippale ne survienne.

    http://www.pourlascience.fr/ewb_pages/a/actualite-virus-a-h1n1-d-ou-vient-sa-virulence-23413.php

    Virus A(H1N1) : d'où vient sa virulence ?
    Yoshihiro Kawaoka
    En juillet dernier, la publication d'une équipe japonaise montrait le virus grippal A(H1N1) (en rouge), présentant une forme filamenteuse inhabituelle, en train de bourgeonner de cellules pulmonaires infectées.

    à voir aussi

    Zachary Shriver et al., Chemistry & Biology, vol. 16, 28 août 2009, Elsevier Ltd
    Les virus grippaux de type A se fixent sur les cellules qu'ils infectent par l'intermédiaire d'une glycoprotéine, l'hémagglutinine (HA) — les autres protéines de la surface virale sont la neuraminidase (NA) et la protéine M2. L'hémagglutinine se lie à des récepteurs cellulaires de type glycanes (en noir) dont la partie terminale est formée par de l'acide sialique (en vert et en rouge), lié à une molécule de galactose. Cette interaction amorce l'entrée du virus dans la cellule cible. Elle est spécifique des différentes souches virales et dépend de la structure des récepteurs glycanes. Alors que les virus saisonniers se lient uniquement aux récepteurs porteurs d'acide sialique lié au galactose par une liaison de type α2,6 (présents au niveau de l'appareil respiratoire supérieur), l'hémagglutinine du virus A(H1N1) se lie à la fois aux récepteurs de type α2,6 et α2,3 (présents au niveau des cellules respiratoires inférieures, dans les poumons).

    L'auteur

    Jean-Jacques Perrier est journaliste à Pour la Science.

    Pour en savoir plus


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